La Cour des comptes modernise sa veille grâce à l’IT
La Cour des comptes produit de nombreux rapports, notamment grâce au travail de son pôle « Veilles ». En 2019, ses méthodes de travail ont évolué en profondeur avec un nouvel outil IT en mode SaaS. L’ambition était de mutualiser les bonnes pratiques, standardiser les lettres de veille, automatiser en partie la veille et proposer de nouveaux services. Bilan cinq ans plus tard (en attendant l’IA).
La Cour des comptes est une institution française historique. Sa création remonte à 1807 et au règne de Napoléon 1er. Sa fonction principale est d’informer du bon usage des deniers publics. Ce travail est le résultat de contrôles, qui se sont traduits en 2023 par la publication de 1300 rapports. Pour réaliser ses missions (évaluation des politiques publiques, contrôle de gestion, certification des comptes de l’État et de la Sécurité sociale, etc.), l’institution et ses magistrats traitent évidemment de grands volumes d’information.
Des veilleurs « interlocuteurs des équipes de contrôle »
Pour cette tâche, les équipes de contrôle peuvent s’appuyer sur la direction de la documentation et des archives (26 agents), et sur son Pôle Veilles, un des quatre pôles qui la composent – avec les collections et la gestion des services au public en bibliothèque, les archives et patrimoine, et la documentation interne et jurisprudence.
La veille est assurée par six personnes, dont son responsable Fabrice Carbonnel. Son objectif est de répondre aux besoins documentaires des équipes de contrôle. Cet accompagnement s’effectue au travers d’une offre de services fournie principalement aux chambres de la Cour des comptes.
Le pôle Veilles rassemble des documentalistes référents sur des thématiques (énergie, santé, éducation, etc.). Les veilleurs sont « des interlocuteurs des équipes de contrôle et peuvent proposer des livrables adaptés », explique Fabrice Carbonnel.
Mais depuis 2019, une petite révolution est en cours à la cour. Un outil SaaS – KB Suite de l’éditeur KB Crawl – automatise une partie de la veille. À l’époque, les livrables issus de la veille étaient très hétérogènes ; aujourd’hui, Fabrice Carbonnel les qualifie même « d’un peu artisanales. »
Un logiciel commun pour harmoniser la production documentaire
En s’outillant, le pôle ambitionnait de disposer d’un levier d’harmonisation de sa production, en particulier les lettres de veille. Autres objectifs : doter d’un logiciel commun « et intuitif » les documentalistes de la Cour et des chambres régionales afin de partager des sources et les paramétrer, pour qu’elles soient accessibles à tous les documentalistes.
« Nous avions aussi besoin d’un support fonctionnel pour la création des lettres de veille et ainsi gagner du temps. Il s’agissait également d’éviter les doublons et redondances entre les veilles […]. Nous souhaitions aussi proposer de nouveaux services, comme l’abonnement aux tags permettant aux utilisateurs d’avoir la main sur leurs thèmes d’intérêt », résume le responsable.
Enfin, le pôle cherchait à publier sur une plateforme unique l’ensemble des articles sélectionnés (baptisée VeillesJF en interne). Lors de l’ouverture d’un contrôle, les documentalistes, comme les usagers, accèdent ainsi plus facilement à des contenus associés.
Pour Fabrice Carbonnel, avoir des statistiques de consultation des documents était un autre besoin important. Auparavant, la Cour des comptes ne disposait pas de ces données. Le module d’analyse lui permet désormais de mesurer son audience, évaluée à 700 lecteurs distincts mensuels – essentiellement sur le site Web.
L’intégralité des lettres de veille migrées fin 2023
Fin 2019, un premier bilan était tiré : l’expérimentation passera à la phase d’adoption. Le déploiement est engagé début 2020 pour l’ensemble des agents de la Cour des comptes et des chambres régionales et territoriales des comptes.
Il s’est achevé fin 2023 par le basculement sur KB Suite de l’intégralité des lettres de veille (les lettres antérieures sont archivées sur l’intranet). Soit 31 lettres thématiques nationales, et 16 en chambres régionales, avec des fréquences de publication diverses. En moyenne, 140 lettres sont diffusées chaque mois.
Et si l’adoption s’est échelonnée jusqu’en 2023, c’est en raison de la profonde évolution des processus de travail induite par l’intégration de KB Suite.
Un long travail d’accompagnement des utilisateurs
« Les habitudes ne peuvent être changées du jour au lendemain. Cela nécessite un long travail d’accompagnement, à la fois des premiers concernés, à savoir les documentalistes, mais également côté utilisateurs », rappelle Fabrice Carbonnel.
« Les habitudes ne peuvent être changées du jour au lendemain. Cela nécessite un long travail d’accompagnement, à la fois des premiers concernés (à savoir les documentalistes), mais également côté utilisateurs. »
Fabrice CarbonnelResponsable du pôle Veilles, Cour des comptes
Des formations et une politique de conduite du changement ont donc été menées. Des actions de formation sont encore réalisées régulièrement, ne serait-ce qu’en réponse au turnover parmi les documentalistes.
Les nouveaux arrivants sont formés à l’utilisation de KB Suite via des sessions animées par KB Crawl. En tant qu’animateur du réseau de documentalistes, Fabrice Carbonnel accompagne en outre les veilleurs dans son usage.
Solution SaaS, la plateforme VeillesJF évolue régulièrement, notamment au niveau des workflows, dont celui de création des sources, « très utile » aux documentalistes en leur permettant « d’être plus efficaces et plus autonomes. »
Le pôle veille s’intéresse à une prochaine mise à jour de KB Crawl qui doit simplifier par un workflow la création des apparences – c’est-à-dire la mise en page de la plateforme. L’ajout pourrait être l’opportunité d’une refonte du design de l’outil, ainsi que de celui des lettres de veille.
Un groupe de travail IA & GenAI
Et quid de l’IA, notamment générative, exploitée pour la veille par certaines entreprises ?
Fabrice Carbonnel confirme « un intérêt pour l’IA de manière générale ».
« C’est un sujet sur lequel tous les services, mais aussi la direction du numérique, réfléchissent », confie-t-il.
Un groupe de travail chargé de la veille IA a été constitué pour les métiers de la documentation. Au cours d’un séminaire de réseau organisé en juin, une restitution sur les usages possibles de l’IA et de la GenAI dans la documentation sera faite.
« Nous savons qu’il faut prendre le train en marche. De fait, nous sommes plusieurs à avoir déjà suivi des formations sur le sujet […]. Mais pour l’instant, aucun projet concret n’a été mis en place », déclare le responsable Veilles.
Depuis 2015, 35 projets d’IA ont été menés à Bercy, relève la Cour des comptes. Mais ils sont très concentrés, les savoirs sont peu réutilisés, et certaines directions seraient à la traîne. L’absence de pilotage ministériel freinerait également les expérimentations.
Pour approfondir sur GED, signature électronique et partage de fichiers